Le marché francilien des messageries bénéficie d’une demande solide, portée par l’évolution des modes de consommation (e-commerce, distribution omnicanale, etc.) qui modifie les schémas logistiques afin d’assurer une livraison la plus rapide et la plus invisible possible. Maillon essentiel des chaines de distribution, l’immobilier de messagerie se retrouve à la croisée de nombreux enjeux économiques, sociétaux et environnementaux. Les externalités d’apparence négatives associées à ce produit complexifient le nécessaire renouvellement du marché. Les défis sont d’autant plus grands qu’ils se posent aux opérateurs dans un cadre géographique tel que l’Ile-de-France, à la fois dense et contraint.
La messagerie : un produit immobilier contraint de se réinventer ?
La massification des envois de colis, boostée par l’essor du e-commerce, renforce les besoins en immobilier logistique de distribution situé à proximité immédiate des villes. Les messageries sont des bâtiments spécifiques à usage d’éclatement des marchandises, dédiés au transbordement et à la gestion rapide des flux d’envois inférieurs à 3 tonnes. L’activité de messagerie est particulièrement gourmande en surface foncière et le besoin sous-jacent en parking est prédominant. Le ratio foncier standard pour une messagerie est de 30 % / 70 % quand la logistique classique présente plutôt une emprise au sol de 50 %. Ce besoin plus conséquent en foncier se justifie par les flux plus importants de véhicules, mais également par la nécessité de stockage de ces mêmes véhicules hors période d’activité.
La localisation d’une messagerie à proximité des axes autoroutiers nationaux et en proche périphérie des métropoles desservies apparaît comme le premier critère de choix dans la stratégie d’implantation immobilière d’un utilisateur. En Ile-de-France, la localisation prime pour une messagerie se situe à proximité immédiate de l’A86 et à la frontière du périmètre à faibles émissions (ZFE). Or, les disponibilités y sont extrêmement limitées.
Répartition géographique des bâtiments de messageries existants en Île-de-France
Source : CBRE Research
Alors que les messageries permettent de desservir les zones urbaines denses et répondent parfaitement aux modes de consommation actuels, la densification du marché se heurte à des défis sociétaux et environnementaux (manque de popularité auprès des décideurs locaux, consommation foncière importante, flux importants de véhicules lourds et légers, etc.). Naturellement, la question de l’avenir des messageries se pose, ce produit de niche étant difficilement réplicable à l’heure de la sobriété foncière. Quelles solutions de densification peuvent-être envisagées ? Quels rôles peuvent jouer la verticalisation et l’automatisation ? Quelles mesures pourraient rendre l’activité plus vertueuse ?
Une forte demande sur un marché pénalisé par le manque d’offre
Le marché des utilisateurs pâtit d’un manque d’offre structurel qui ne cesse de s’accroître dans un contexte francilien de plus en plus complexe (saturation des axes routiers, densification résidentielle, injonctions environnementales, etc.). Avec un stock d’offre immédiate de 60 000 m² à la fin du 1er trimestre 2024, soit un taux de vacance de 2,8 %, la tension à l’offre sur le marché francilien des messageries demeure prégnante. Ce défaut d’offre est tant quantitatif que qualitatif puisque 73 % des surfaces vacantes sont en état d’usage. Le potentiel de renouvellement de l’offre reste bridé par la disponibilité foncière et l’acceptabilité des projets auprès des collectivités locales et des riverains.
Sur les 12 derniers mois, plus de 40 000 m² ont été commercialisés sur le marché francilien des messageries, un volume en déclin depuis plusieurs années qui est le reflet direct du manque d’offre. Répondant à des caractéristiques très hétérogènes selon le schéma opérationnel de l’utilisateur, le marché repose principalement sur une logique de bâtiments clés-en-main. Toutefois, les tensions à l’offre conduisent de plus en plus les utilisateurs à se positionner sur des surfaces existantes qui ne sont pas toujours en adéquation avec les standards du marché de la messagerie.
Dans un contexte de forte asymétrie offre / demande, la tendance haussière des valeurs locatives ne représente pas à ce jour un frein dans les stratégies d’implantation immobilière des utilisateurs. En effet, ces derniers sont prêts à assumer des valeurs locatives élevées dès lors qu’un produit disponible répond à leurs besoins de proximité avec les bassins de consommation.
Pour aller plus loin sur le sujet, téléchargez notre dernière étude sur le marché de la logistique du froid en France métropolitaine (*sous réserve d’acceptation).
Découvrez dans cette étude :
- Une rétrospective du développement de l’immobilier de messagerie
- Un décryptage des enjeux actuels et futurs auxquels se retrouve confronté le segment
- La dynamique récente du marché des utilisateurs : demande placée, offre, valeurs locatives
- La nouvelle approche des investisseurs : volumes investis et taux de rendement
Aubane Becker
Consultante Research Senior