Le e-commerce bouleverse les schémas logistiques traditionnels. Les messageries – infrastructures dédiées au transbordement et à la gestion rapide des petits colis – occupent une place centrale dans l’organisation des chaines de distribution. En Île-de-France, l’immobilier de messagerie cristallise les défis de la métropolisation de la fonction logistique dans un environnement où rareté foncière, exigence de performance et acceptabilité sociale doivent désormais cohabiter. Focus sur un marché à la croisée des chemins.

L’immobilier de messagerie au défi des contradictions modernes

La croissance du e-commerce, couplée à la montée en puissance du retail omnicanal, exige un maillage territorial fin afin de garantir un processus de livraison rapide et fiable. Dans ce contexte, les messageries urbaines et périurbaines se révèlent essentielles pour optimiser les flux logistiques du dernier kilomètre. La localisation des messageries, stratégiquement positionnées à proximité des axes autoroutiers et des zones périphériques des grandes métropoles, constitue un critère déterminant pour les choix d’implantation immobilière des utilisateurs. En Île-de-France, l’emplacement idéal pour une messagerie se situe à proximité immédiate de l’A86. Or, les opportunités d’implantation sont considérablement restreintes, le marché francilien des messageries faisant face à une rareté de l’offre structurelle.

En effet, le modèle de la messagerie peine à se répliquer dans un contexte francilien de plus en plus complexe (saturation des axes routiers, raréfaction foncière, densification résidentielle, etc.). Le marché se heurte à des freins sociétaux et environnementaux, malgré des vertus économiques locales comme la création d’emplois qui différencie ce type d’actif des entrepôts traditionnels. Les messageries, consommatrices de foncier et engendrant une hausse des flux routiers, suscitent de nombreuses réticences de la part des décideurs locaux. Ce dilemme met en évidence l’inadéquation croissante entre les besoins logistiques contemporains et les modèles urbains existants.

Visuel : Répartition géographique des bâtiments de messageries existants en Île-de-France 

Marché des utilisateurs : une demande placée en repli conjoncturel face à une offre durablement restreinte

Après une période d’accélération en 2020-2021, portée par la crise sanitaire et l’explosion du e-commerce, le marché des utilisateurs de messageries connaît aujourd’hui une phase de stabilisation. Le taux de pénétration du e-commerce, qui avait culminé à plus de 12 % en 2021, s’est réajusté entraînant un repli conjoncturel de la demande. Les opérateurs, qui se sont équipés pour faire face à la percée du e-commerce pendant la période covid, privilégient actuellement l’optimisation de leurs capacités existantes.

Cette accalmie conjoncturelle de la demande ne permet pas de contrer les tensions structurelles qui pèsent durablement sur l’offre de messagerie en Ile-de-France. Le marché reposant sur une logique de bâtiments clés-en-main, c’est surtout l’offre future neuve qui constitue un indicateur clé pour la mobilité des utilisateurs. Or, les perspectives de réapprovisionnement du marché sont extrêmement limitées avec un nombre de projets restreint. L’innovation immobilière devient donc une nécessité. La verticalisation et l’automatisation des bâtiments apparaissent comme des pistes non négligeables pour densifier l’existant.

Marché de l’investissement : la messagerie, un produit de niche convoité en zone tendue

Longtemps réservé à un cercle restreint d’investisseurs spécialisés, l’immobilier de messagerie attire désormais l’attention d’un public plus large à l’heure où la logistique urbaine apparaît comme un relais de croissance. En tant qu’archétype du last mile, les messageries offrent un profil défensif attractif en zone dense où leur rareté et leur valeur foncière en font des actifs prisés.

En 2024, le marché francilien a concentré plus de la moitié des volumes investis en immobilier de messagerie en France avec cinq transactions totalisant 142 M€. Si le marché francilien des messageries concentre beaucoup d’intérêt, la pipeline d’offre reste insuffisante au regard de la demande des acquéreurs potentiels et c’est ce décalage qui constitue le principal frein aux volumes d’investissement. La convergence des taux de rendement prime entre la messagerie et la logistique classe A depuis 2021 témoigne de la solidité des fondamentaux du marché qui répond aux critères core. Cette dynamique pourrait se renforcer à l’avenir avec une liquidité potentiellement supérieure pour le segment de la messagerie, porté par une tension locative plus forte et une demande soutenue par le e-commerce.

Pour aller plus loin sur le sujet, téléchargez* notre dernière étude sur le marché des messageries en Île-de-France (*sous réserve d’acceptation).

Découvrez dans cette étude :

  • Une rétrospective du développement de l’immobilier de messagerie
  • Un décryptage des enjeux actuels et futurs du segment à l’ère du e-commerce et de l’omnicanal
  • Les évolutions sur le marché des utilisateurs : demande placée, offre, valeurs locatives
  • La nouvelle approche des investisseurs : volumes investis et taux de rendement
Aubane Di Virgilio

Aubane Di Virgilio

Consultante Research Senior

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