En cas d’inaction de leur part, bailleur et preneur peuvent parfois se retrouver dans une situation originale après la date d’expiration prévue à leur bail commercial : on parle alors de tacite prolongation du bail.
Une conséquence de l’inaction des parties
Volontaire ou non, cette situation se rencontre à défaut de volonté formalisée de l’une des parties de renouveler ou résilier le bail. En conséquence, à défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail commercial se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat.
Le même bail… à durée indéterminée
Cette tacite prolongation du bail n’entraine pas la formation d’un nouveau contrat. Cela signifie pour les parties que toutes les clauses et conditions du bail initial continuent de s’appliquer durant la période de tacite prolongation.
Cette tacite prolongation emporte une certaine fragilité dans la relation contractuelle des parties puisque le bail devient à durée indéterminée. Concrètement, à tout moment au cours de cette période, chaque partie peut résilier le bail en donnant congé « au moins six mois à l’avance et pour le dernier jour du trimestre civil ». Par exemple, si un locataire délivre congé un 7 mai, l’effet dudit congé se produira pour le 31 décembre de la même année.
Un potentiel déplafonnement du loyer du bail renouvelé
Dans certains cas, un bailleur peut grandement avoir intérêt à laisser le bail se prolonger au-delà d’une durée de douze années. En effet, l’article L145-34 du Code de commerce exclut expressément le principe du plafonnement du loyer renouvelé lorsque « par l’effet d’une tacite prolongation, la durée du bail excède douze ans ».
Pour des locaux tertiaires (« à usage exclusif de bureaux ») ou des locaux monovalents (hôtels, cinémas etc.), cette règle n’a aucun impact puisque, lors du renouvellement du bail, le loyer doit correspondre à la valeur locative. En d’autres termes, pour ce type de locaux, le loyer ne sera pas plafonné lors du renouvellement du bail.
Dans les autres cas (commerces, locaux mixtes etc.), une prolongation de la durée du bail supérieure à douze ans peut se révéler très avantageuse pour un bailleur… ou désastreuse pour un locataire. Au-delà du déplafonnement du loyer du bail renouvelé, l’article L145-34 alinéa 4 du Code de commerce limitant annuellement l’augmentation du loyer déplafonné à 10% n’aurait a priori pas vocation à s’appliquer.
Cette situation contraste avec l’esprit « pro-preneur » de la récente loi « Pinel » et semble être la conséquence d’un oubli (?) du législateur. Il est donc vivement conseillé aux locataires d’être très vigilants en cas de tacite prolongation de leur bail !
Matthieu Robillot
Département Juridique CBRE